Une nouvelle paroisse pour Anglet... au milieu des pins

1er septembre 1925un jeune prêtre, l’abbé Saint-Laurent se voit confier la tâche de créer une paroisse au milieu des pins à Blancpignon. Elle sera vouée à Saint Joseph patron des ouvriers.

 

C’est alors un pignada sablonneux habité par quelques 1400 âmes dont un tiers d’espagnols réfugiés pour la plupart. Population issue de la guerre et composée surtout d’ouvriers, de quelques employés, chefs d’équipe et aussi, de pêcheurs, résiniers, blanchisseuses, artisans ou petits commerçants qui au besoin, pour les baptêmes, mariages et enterrements vont à Saint Léon seule église d’Anglet.

 

Un certain juge Lespès y possède une maison et vient avec ses 2 sœurs pour y chasser. 

 

C’est au milieu des pins, quelques maisons sont regroupées çà et là : Fine, Montbrun, Place Lamothe (aujourd’hui La Bécasse), Brise-Lames, le long de la seule route (actuelle avenue de l’Adour) qui, avec le tram dessert les entreprises installées près du port : Poudrerie, Bassin du Radoub et établissements Guillerme, Bois Léglise, Corderie Sorin, fabrication et réparation de bateaux Lavignasse, Etablissements Moyrie, Tannerie, Savonnerie, Verrerie. Telle était l’activité de ce quartier, héritage de sa position, à l’abri des tempêtes, dans une courbe de l’Adour, port de Hausquette depuis au moins le XVIème siècle.

 

Ce quartier qui pourrait tenir son nom d’un certain Docteur Claude Blampignon, originaire de Troyes, installé dans le moulin de Hausquette dès 1695, à moins qu’un certain Orieux dit Blancpignon,  conspirateur décapité quelques années auparavant n’en soit le responsable !


1ère messe... dans un bureau !

Le 29 novembre 1925 à lieu une 1ère messe dans un bureau prêté de la Verrerie en sommeil.

 

Ce lieu fera office de chapelle pour les quelques fidèles pendant 2 ans ! Quelques mois plus tard, une pièce mise à disposition « sur le chemin de la maison de Lespès » regroupera les enfants du catéchisme ! Quant au cimetière, celui de Louillot fait l’affaire !

 

Commence alors l’immense tâche pour ce jeune prêtre à la fois de trouver les fonds pour construire sa paroisse et d'apprivoiser ce quartier majoritairement ouvrier où la religion n’est pas toujours bien vue.

 

Un journal paroissial est créé : « Anglet - Adour », mensuel qui racontera l’évolution de cette communauté, motivera les dons et relatera leur avancement au fil des mois.

Et cela porte ses fruits !

Février 1926 : plus de 3 000 m² de pignada sont donnés par un commerçant bayonnais pour la construction de l’église et le logement du prêtre. 

Dès juillet 1926 le jeune abbé s’installera dans un presbytère tout neuf.

 

Août : le 1er conseil paroissial se constitue avec quelques hommes de bonne volonté !

 

Septembre : la 1ère pierre de la crypte est posée pour servir de fondation à la future église.

 

Décembre : 200 enfants fréquentent l’école du quartier, 30 seulement le catéchisme !

 

Bilan de cette 1ère année 1926 : 22 baptêmes, 19 Mariages et 22 enterrements.

C’est également cette année-là, que se dessinent, pour faciliter les déplacements vers ce nouveau lieu, une « route de l’église » depuis la station de tram Blancpignon et la « route de l’Empereur » depuis l’alimentation Fine.

 

Le 30 octobre 1927 est célébrée, en grandes pompes, la 1ère messe inaugurale dans une crypte presque terminée.

 


Saint Joseph de Blancpignon est né !

Mais il faut occuper et éduquer les jeunes, le jeudi et aux vacances !

 

« La Blancpignonnaise » est constituée, association déclarée, où garçons et filles auront leurs activités spécifiques et bien distinctes : patronage et sport pour les garçons qui y pratiquent foot, cross, gymnastique, plus tard rugby, diverses courses à pied, pelote, et pour les filles, couture, broderie, chant, théâtre.

 

Mois après mois, année après année, petit à petit, au gré des kermesses, des séances récréatives, des manifestations sportives, des dons petits et plus gros (même le roi Alphonse XIII d’Espagne prit part à cette quête) la crypte se construit, ainsi qu’une salle paroissiale qui prend l’eau les jours d’orage, pour abriter séances de cinéma et spectacles récréatifs, un fronton dans les pins pour les amateurs de pelote.

 

En parallèle, l’idée du cimetière fait son chemin, il sera ouvert en juillet 1929

 

Un dispensaire est programmé pour soigner les familles démunies, un ouvroir sera ajouté. Deux nouvelles routes sont tracées, l’une depuis la rue des écoles (en partie actuelle rue Rénéric), l’autre depuis le Lazaret.

 

En 1939, ouvroir et salle récréative seront réquisitionnés par la mairie pour y loger quelque temps, l’école des garçons.

 

 

Une situation socio-économique difficile, le décès imprévu de l’abbé, la guerre, sont autant d’éléments qui laisseront les travaux en suspens. Le successeur continuera à motiver les donateurs sur la future église, il projettera la création d’un complexe sportif, initiera et financera les achats de terrains au nom de la Blancpignonnaise, seule habilitée à gérer les biens non cultuels de la paroisse.

 

Orok-bat, alors association culturelle qui fera connaître chants et danses basques à travers l’Europe et l’Afrique du Nord, y voit le jour et sera hébergé dans ces lieux.

 

Blancpignon continue à se peupler, à l’instar du Boucau, son voisin d’en face, avec les salariés des entreprises locales : Penarroya, usine Latécoère–Breguet, Chantiers de l’Adour, Gaz au Lazaret, Centrale thermique et quelques réfugiés espagnols ou portugais.

 

Population aux convictions très disparates, souvent inspirées par les idées venues de l’Est plutôt que par la foi catholique, population qui valut à un de ses vicaires d’être surnommé Don Camillo tellement il aimait se chipoter avec quelques Peponnes du quartier. Quoi qu’il en soit chacun se respectait et les sœurs infirmières du dispensaire piquaient sans distinction, et tout aussi gracieusement, fesses rouges, roses ou chrétiennes.

 


Eté 1968 – révolution à St Joseph... Une église, une vraie, est enfin inaugurée.

Construite sur la crypte, elle se dresse blanche, moderne en limite de forêt, proche d’un cimetière maintenant élargi à l’ensemble de la commune. Son sous-sol restructuré accueillera longtemps le catéchisme et les répétitions de la chorale. Ses vitraux relatent l’activité du quartier.

 

Coincé entre Adour et pignada, Blancpignon, c’est en 2010, un « village » encore plus mixé où petites maisons rénovées des années 20, villas plus récentes, modernes et cossues et résidences se côtoient, quartier toujours habité par quelques-unes des familles fondatrices où se mêlent avec bonheur ouvriers, employés, enseignants, cadres, professions libérales, actifs ou retraités.

 

Les usines ont changé quelques fois de nom, le plus souvent d’orientation, le port s’est spécialisé avec le soufre, les abattoirs sont venus s’installer auprès de l’EDF au Lazaret, la zone artisanale du Redon et le Port de Brise-Lames ont modifié le profil économique de ce bord d’Adour, et le surf et les sports de glisse s’y sont infiltrés. Les commerces fleurissent, tous en majorité sur cette avenue de l’Adour longtemps seule voie du quartier.

 

Il y a 98 ans cet automne, un certain abbé Saint Laurent disait la 1ère messe de la paroisse, dans une Verrerie à Blancpignon.


Texte rédigé à partir d'un écrit de Claudine Pédurthe (2005), corrigé en 2010 puis 2023

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